Edito
Il y a 170 ans, Hugo monte à La Tribune de l’Assemblée nationale pour interpeller ses pairs sur la nécessité d’éradiquer la misère, cette misère alors terriblement visible dans les faubourgs de la capitale, il les secoue et leur demande de mener la bataille culturelle « vous n’avez rien fait... ». Nous voici en septembre 2019, ils sont des milliers, 6 000 sans doute à Paris... invisibles pour la plupart, migrants pour beaucoup, vivant dans la fange, les excréments, l’urine au milieu des rats. Au même moment, d’étranges propositions se font jour, censées alimenter et éclairer un débat sur l’immigration. Il faut supprimer le droit du sol disent certains, réduire le regroupement familial affirment d’autres, modifier les conditions d’accès à l’Aide médicale d’État, disent les troisièmes. Bref, il faut tout faire pour diminuer l’attractivité de notre territoire disent-ils d’une même voix, et lutter contre la fraude. Peu importe que le droit de vivre en famille soit un droit constitutionnel, que le droit du sol soit un élément de stabilité d’ailleurs sous conditions, que l’AME soit un outil de santé publique indispensable, en rien responsable de la fraude qui affecte la caisse nationale d’assurance maladie, que ces trois thèmes réunis soient l’objet de fausses rumeurs propagées par les populistes.
Rien n’y fait. Le plus simple chemin emprunté est celui qui emmène vers la rhétorique des populistes. Le chef de l’État a-t-il dit un jour récent « je ne veux voir personne à la rue » ? A-t-il estimé un moment que l’Allemagne avait sauvé l’honneur de l’Europe ?
Nous pouvons nous l'avouer. Nous sommes nombreux au sein des associations de solidarité à avoir eu honte pour notre pays qui laisse tant et tant de personnes à la rue, les 4/5ème de celles et ceux qui contactent quotidiennement le 115, jeunes, travailleurs pauvres, migrants. C’est parce que nous savons que les sujets que nous portons requièrent une volonté politique sans faille que nous appelons et entendons participer à l'organisation d'une conférence de consensus dès les prochaines semaines.
Mettre à distance le cynisme comme la tentation du rejet, l'instrumentalisation de la concurrence des précarités, est indispensable pour qui veut agir en responsabilité
Ensemble, nous pouvons y parvenir.
Pierre HENRY, Directeur général de France terre d'asile
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