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Parole à Jawid Ghani : « C’est un beau mélange, la musique que je joue. »

Publié le : 21/06/2024

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Cet article est issu de la Lettre de l'asile et de l'intégration, newsletter bimestrielle de France terre d'asile qui propose un éclairage sur des problématiques liées à l'asile et l’intégration en France. Inscrivez-vous pour la recevoir !

À l’occasion de la Fête de la musique, France terre d’asile a rencontré Jawid Ghani, artiste afghan dont la musique est traversée d’influences multiples. Aujourd’hui installé en France, il travaille dans une association culturelle et linguistique d’aide aux personnes exilées venant principalement d’Asie. Son but : continuer à partager le patrimoine musical afghan en France, et mettre en avant la musique comme opportunité de rencontre entre les cultures.

La Fête de la musique à la Cité fertile

Le 21 juin, France terre d’asile propose de célébrer la Fête de la musique et la Journée mondiale des réfugiés lors d'une journée rythmée par des concerts et DJ sets, table-ronde, expositions, village associatif, stands de nourriture…

Face à l’hostilité politique croissante à laquelle font face les personnes qui cherchent refuge en France et en Europe, France terre d’asile a souhaité porter haut et fort la solidarité comme valeur fondatrice de notre société, et mettre en lumière les parcours des personnes exilées.  

Le tout au cours d’un événement gratuit à la Cité fertile, un lieu accueillant et engagé !

 

Comment décririez-vous votre style de musique ?

Ma musique est un mélange de musique folklorique traditionnelle, de musique actuelle d’Afghanistan, avec une influence de la musique indienne. Dans la musique afghane déjà, il y a une forte influence de l’Asie centrale, l’Afghanistan est un carrefour de cultures, c’est ce qui fait la beauté de ce pays. C’est un beau mélange, la musique que je joue.

Vous voulez aujourd’hui partager la poésie persane et participer à protéger le patrimoine musical afghan. Pourquoi est-il menacé aujourd’hui ?

La musique afghane est aujourd’hui en danger à cause des talibans. Quelques jours après leur arrivée au pouvoir le 15 août 2021, la musique était interdite. La musique accompagne la poésie, et dans la poésie il y a souvent des messages de résistance, surtout dans notre culture. Les talibans n’aiment pas ça, parce que cela donne des idées aux gens, qui risquent un jour de se révolter, ils ont donc menacé beaucoup d’artistes. Aujourd’hui c’est impossible d’être musicien en Afghanistan.

C’est une des raisons pour lesquelles j’ai pris la décision d’avancer dans mes projets artistiques, pour transmettre la musique afghane pour les générations d’après, pour nos enfants, ici ou en Afghanistan. Chaque jour où la musique est interdite, c’est un risque pour le patrimoine afghan. On ne pourra pas rattraper le temps perdu. Donc je note et j’enregistre tout. J’ai l’espoir que les talibans ne resteront pas au pouvoir et que je pourrai revenir avec énormément de projets, comme la création d’écoles de musique.

Quel rôle a joué la musique dans votre parcours d’exil et quelle place a-t-elle aujourd’hui pour vous en France ?

Pour les personnes exilées c’est très difficile de quitter notre pays, d’être loin de nos racines, de la culture dans laquelle on a grandi. Aujourd’hui, la musique a pour moi un rôle de méditation, elle m’aide beaucoup mentalement. Quand je chante certaines musiques, je me rappelle des moments avec mon père, dans sa voiture, où on écoutait de la musique en allant à Kaboul. Je ne suis plus en France, je suis là-bas, dans les montagnes d’Afghanistan.

En France, alors que j’étais sans emploi, j’ai commencé à organiser des événements dans des petites salles à Paris, j’ai commencé à partager la scène avec différents musiciens d’Inde, d’Iran, de France… ce qui m’a permis de rencontrer beaucoup de personnes avec qui j’ai développé des amitiés fortes.

Quelles recommandations auriez-vous pour valoriser les pratiques artistiques des personnes exilées?  Quels conseils voudriez-vous faire passer aux personnes exilées qui, comme vous, souhaitent continuer de pratiquer leur art dans leur pays d’accueil ?

Pour les artistes français déjà, exercer ce métier peut être difficile, pour une personne exilée, c’est encore plus dur. La pratique de son art ne permet pas de payer son loyer, de pouvoir manger. J’ai des amis musiciens exilés qui sont en grande difficulté, alors que pour faire de la musique, pour partager, il faut de la stabilité. Mon conseil serait de profiter de chaque opportunité de faire de la musique, pour partager au maximum ce qu’on a. C’est ça qui fait la richesse de la France, c’est aussi grâce aux artistes de tous les pays du monde que la France et Paris ont un rayonnement artistique si important.

Quels sont vos projets pour la suite ?

J’ai commencé un projet de trio musical, qui s’appelle Odestân Trio, que j’aimerais continuer à faire avancer. Je travaille aussi avec deux grands maîtres de la musique afghane, Gholam Hussein et Gholam Nejrawi, avec lesquels je joue de la musique typique du folklore d’Afghanistan. Enfin, j’aimerais obtenir le statut d’intermittent, faire de la musique mon métier, tout en continuant de faire du bénévolat dans des associations.