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Le centre d’accueil et d’examen de la situation (CAES), n'est pas facile d'accès. Devant l'adresse indiquée boulevard Ney, dans le 18e arrondissement de Paris, impossible de l'apercevoir. Caché derrière un imposant centre de stabilisation(ou CHS, centre d'hébergement d'urgence pour les SDF) au bout d'une grande cour, le petit bâtiment austère de deux étages n'affiche aucune mention "CAES". C’est pourtant là, dans des anciens bureaux désaffectés, qu’a ouvert en juin 2018 un des cinq centres de premier abri de la région parisienne.
Ces structures chargées d’accueillir les primo-arrivants dans la capitale, offrent un toit et un peu de répit aux migrants. Elles leur proposent aussi d’examiner sur place leur situation administrative.
À l’entrée, Hadi et ses amis, discutent au soleil. Ils sont tous Afghans et ont déjà passé six jours au centre du boulevard Ney. Ils ne sont pas familiers avec le terme "CAES" - qu’ils ont l’air de découvrir durant l’interview – mais sont très heureux de ne plus dormir sur les trottoirs parisiens. Certains d’entre eux attendent de déposer un dossier de demande d’asile à la préfecture, à 50 mètres de là, d’autres, comme Ali, sont des "déboutés". "J’ai reçu une réponse d'asile négative de l’Ofpra mais j’ai déposé un recours, je suis hébergé ici en attendant".
Le CAES est la première étape dans le processus de prise en charge des migrants. Leur but : que les occupants soient tous redirigés dans un délai de 11 jours maximum vers une autre structure d’hébergement de longue durée en France. En fonction des places disponibles, ils pourront ainsi être envoyés en centre d’accueil et d’orientation (CAO), en centre d’hébergement d’urgence pour migrants (CHUM) ou encore en centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA).
"Les CAES fonctionnent un peu comme sur le modèle du CPA [centre humanitaire de la Chapelle fermé en mars 2018, ndlr]", précise Antoine Troussard, chef adjoint de cabinet à la préfecture de Paris. "C'est un premier sas. Comme au centre de la Chapelle, on rencontre ici une équipe de l’Ofii [Office français d’immigration et d’intégration] et une équipe médicale pour un premier bilan santé [...] Puis, on est transférés ailleurs au bout de 11 jours".
Ici, l’endroit est blanc, épuré. On se croirait dans les couloirs d’un hôpital. L’espace, divisé entre plusieurs chambres-dortoirs, des salles de douches et un réfectoire au rez-de-chaussée, semble convenir aux migrants. "C'est propre et c'est mieux de vivre là que dehors", sourit un jeune Afghan qui explique avoir des amis toujours à la rue. Pour éviter les intrusions et les abus, les hébergés ne peuvent accéder au bâtiment qu’en présentant une carte.
Dans les CAES, le taux de rotation est élevé. Déjà 2 250 personnes ont transité par le centre du boulevard Ney depuis le mois de juin. "Aujourd’hui, nous avons 43 places libres sur un total de 150", précise Jérôme Treuvenot, directeur adjoint du CAES. "Une situation exceptionnelle", car la structure tourne quasiment tout le temps à plein. "Il y a eu des départs ce matin, mais dès demain, il y aura des nouvelles arrivées".
Les arrivées, justement, sont décidées en amont. Inutile de se présenter directement à l’entrée d’un CAES. Pour y avoir accès, il faut suivre un cheminement précis : se rendre dans les centres d'accueil de jour de la capitale qui, ensuite, les orienteront vers l’un des cinq CAES de la région. Ou alors, aller à la rencontre des équipes de France Terre d’asile (FTDA) qui effectuent des maraudes dans le nord de Paris. Ces équipes FTDA sont chargées d’envoyer les migrants vers les centres d’accueil de jour (voir les infos pratiques ci-dessous).
"Je suis allé dans un centre d'accueil de jour sur l'île de la Cité pour qu'on me redirige vers un abri", explique un jeune Afghan. "Mais comme il y a du monde, [le personnel du centre de jour] fait des tirages au sort avec des jetons pour choisir les migrants qui peuvent entrer !", continue-t-il. "Quand on tire pas le bon jeton, c'est le retour à la rue. Je vous promets que ça se passe comme ça".
Moujahid, un Soudanais de 28 ans, a mis, lui, un mois, avant de comprendre le système. "J’ai passé de nombreuses nuits dans la rue à [la porte de] la Chapelle. Je ne comprenais pas comment ça fonctionnait pour être à l’abri", raconte-t-il en descendant de son lit. "Puis un jour, enfin, j'ai vu des gens de France Terre d'asile. Ils ont pu m'aider".
Pour l'État, le système est bien ficelé. "Les migrants sont bien renseignés. Ils savent où aller", insiste Antoine Troussard de la préfecture de Paris. Hadi, un autre Afghan de la bande, reconnaît que des efforts sont faits par les autorités pour aider les migrants, mais il ajoute que le système reste complexe. "Pour ceux qui parlent un peu anglais ou français, ça va, ils savent se débrouiller", continue-t-il. "Mais pour les gens qui ne parlent que leur langue, c’est vraiment très compliqué de comprendre où aller".
Aujourd'hui, les associations estiment qu'environ 700 migrants - hommes, femmes et enfants - vivent toujours sur les trottoirs du nord de Paris, vers la porte d'Aubervilliers.
Info Migrants, Charlotte Boitiaux, le 21 septembre 2019.