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La Croix : Comment a été déterminé l’âge des migrants admis à être évacués comme mineurs isolés lors de l’opération de démantèlement du camp de Calais ? Certains ont dénoncé des tris au faciès…
Pierre Henry : Je ne veux pas polémiquer, c’est trop facile. Il faut rappeler que nous étions dans une opération d’urgence. La seule chose que l’on peut faire dans ce genre de situation, c’est d’écarter des dispositifs réservés aux mineurs les gens qui, très manifestement, sont majeurs. Mais dès lors qu’il y avait un doute, il profitait toujours à la personne qui se présentait comme mineure. Il est d’ailleurs possible qu’un certain nombre de majeurs se soient glissés dans le dispositif.
L’opération était exceptionnelle, massive et rapide. Nous n’avions pas le temps de respecter les canons du droit commun de la protection d’enfance, qui passe par des entretiens approfondis et où une expertise osseuse peut intervenir à la fin, en cas de contestation. Évidemment, si par mégarde, un mineur a été dirigé vers un centre d’accueil et d’orientation (CAO) pour majeurs, il a toujours la possibilité de faire valoir sa minorité et de revenir dans le processus pour mineurs.
Que vont devenir les mineurs isolés qui se trouvaient Calais ?
P. H. : Mille cinq cents mineurs ont été mis à l’abri dans le Centre d’accueil provisoire, situé à Calais. C’est plus que les 1 291 que nous avions décomptés. Il y a ceux qui rejoindront ensuite la Grande-Bretagne. Je ne sais pas combien ils seront, mais plus de 600 mineurs ont déclaré avoir de la famille de l’autre côté de la Manche. C’est une procédure lente, les Britanniques doivent faire leur part du travail.
Les autres partiront vers des CAO spécifiques aux mineurs, répartis sur tout le territoire français. Ils bénéficieront d’entretiens approfondis et seront conseillés. Mais nous ne serons toujours pas dans le schéma normal de protection de l’enfance. Nous serons dans le cadre d’une mise à l’abri, financée par l’État.
Ensuite, ces mineurs devront être orientés vers le droit commun, c’est-à-dire vers les départements dont dépend l’aide sociale à l’enfance (ASE). Cela reste une opération complexe, qui demande de la solidarité. Or, aujourd’hui, de nombreux départements ne veulent pas entendre parler de la répartition des mineurs.
Pourquoi reste-il aussi difficile de traiter la question des mineurs isolés étrangers en France ?
P. H. : On estime qu’il y a en France entre 6 000 à 8 000 mineurs isolés, concentrés sur leurs points d’arrivée. Beaucoup se trouvent dans le Pas-de-Calais et en Seine-Saint-Denis. En France, il y a 95 départements et autant de politiques en matière d’application du droit.
Un certain nombre de départements, face à l’augmentation des dépenses, font de la prise en charge des mineurs isolés étrangers une variable d’ajustement. C’est aussi simple que ça. Je rappelle que ces mineurs représentent moins de 5 % de l’ensemble des recours à l’aide sociale à l’enfance. Qu’on ne vienne pas nous dire qu’ils encombrent l’ASE !
La Croix, 27/10/2016