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Parmi eux, une centaine de mineurs livrés à eux-mêmes.
A l’écart du village de Loon-Plage, quelques baraquements ont fait leur apparition sur un terrain vague appartenant à la communauté urbaine de Dunkerque. Des palettes au sol, une bâche de plastique noir en guise de toit et, un peu plus loin dans l’herbe, les traces d’un feu. Un camp de fortune s’est installé là, au creux des dunes. À l’abri des regards, mais pas des inspections policières. Les forces de l’ordre viennent régulièrement « visiter » les lieux.
Une dizaine de jeunes Afghans ont trouvé refuge ici. Tous sont mineurs et ont fui leur pays pour échapper aux talibans. Le plus jeune a à peine 15 ans. Arrivé à Bari, en Italie, après un périple de plusieurs semaines, il s’est sauvé du foyer de mineurs où il avait été placé pour reprendre la route. Destination Calais, la porte d’entrée pour l’Angleterre.
Chaque nuit, il tente sa chance avec ses copains d’infortune, essayant de se faufiler sous la bâche d’un camion. En attendant, le petit groupe survit grâce aux associations caritatives présentes sur le terrain : Médecins du monde assure le ravitaillement en eau potable et en médicaments, Salam la distribution quotidienne de vivres. Un peu plus loin, au pied de la voie ferrée, les baraquements sont déserts. Les Kurdes réfugiés dans ce camp ont été arrêtés hier par la police, nous explique l’un des jeunes Afghans, qui ignore où ils ont été emmenés.
Depuis le démantèlement de la « jungle » de Calais, décidé par le ministre de l’immigration Éric Besson voilà tout juste un an, le problème des migrants reste entier. Certes leur nombre a baissé, en raison des arrestations répétées et des reconduites à la frontière : ils sont aujourd’hui un peu moins de 500, essentiellement originaires d’Afghanistan et du Soudan, au lieu d’un millier avant septembre 2009.
Mais leur situation est plus précaire que jamais. Indésirables à Calais, ils se sont rendus «invisibles» pour échapper aux rafles et se sont éparpillés tout le long du littoral et même à l’intérieur des terres, à Steenvoorde ou Norrent-Fontes.
« Éric Besson a atteint son objectif, il a réduit le nombre de migrants, mais à quel prix ?, s’indigne Matthieu Quinette, coordinateur de Médecins du monde pour le littoral. Aujourd’hui, les migrants n’ont même plus d’abri pour se protéger du danger et des intempéries. Dispersés dans des camps sauvages le long de la côte, ils sont moins accessibles aux associations humanitaires et encore plus à la merci des passeurs. »
Livrés à eux-mêmes, les migrants survivent grâce à la solidarité de la population et des bénévoles qui se relaient jour après jour pour assurer la distribution de repas (250 repas chauds servis quotidiennement), les douches, le vestiaire et les soins médicaux. Depuis sept ans, les associations sont fidèles au poste mais les héros sont fatigués et l’usure guette.
« L’État s’est totalement désengagé, s’insurge Mélanie, de l’association Salam. Aujourd’hui, ce sont les associations qui doivent prendre le relais dans des conditions très difficiles. La police détruit régulièrement le matériel humanitaire que nous distribuons : tentes et couvertures sont passées au gaz lacrymogène et rendus inutilisables. Des arrestations ont lieu lors des distributions de repas. Ce harcèlement continuel rend notre engagement très éprouvant. »
Seule éclaircie dans ce tableau très sombre : l’arrivée à Calais d’un représentant du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) en juin 2009. « Alors que beaucoup de migrants ont fui leur pays pour violation des droits de l’homme, très peu d’entre eux déposaient une demande d’asile politique, faute d’être informés sur la procédure, explique Mathilde Tiberghien, administratrice de l’antenne calaisienne du HCR. Par notre présence sur place, nous pouvons les aider et les accompagner dans leurs démarches, en lien avec France Terre d’asile. »
Depuis l’installation du HCR, 500 demandes d’asile ont ainsi été déposées à la sous-préfecture de Calais. Mais la procédure s’avère très longue : en un an, dix dossiers seulement ont abouti. Et elle n’est pas sans risques pour les réfugiés. Car le demandeur d’asile ne peut pas choisir son pays d’accueil.
Il doit faire sa demande dans le premier pays européen traversé. Pour les Afghans, il s’agit le plus souvent de la Grèce, pays réputé pour ses pratiques expéditives vis-à-vis des migrants et rappelé plusieurs fois à l’ordre par Bruxelles à ce sujet. Nombre de migrants hésitent donc à sortir de la clandestinité pour se signaler auprès du HCR.
Et puis demander l’asile en France, c’est renoncer à leur rêve… Ils ont parcouru tout ce chemin, dans des conditions souvent épouvantables, pour passer en Angleterre et commencer une nouvelle vie. Ils ne veulent pas se voir stopper si près du but.
La Croix, le 22/09/2010
Florence QUILLE
C'était il y a tout juste un an, quasiment heure pour heure : plusieurs pelleteuses avaient détruit ce qu'on a surnommé la "jungle", vaste bidonville à ciel ouvert dans la ville de Calais. Un lieu qui avait accueilli jusqu'à plus d'un millier de migrants en situation irrégulière. L'opération, annoncée de longue date, avait été très médiatisée, si bien que "seules" 276 personnes avaient été interpellées avant d'être, pour la plupart, relâchées. Un succès, malgré tout, pour Eric Besson à l'époque...
Ecoutez le reportage
France inter, le 22/09/2010