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Six associations interpellent l’exécutif sur un usage « trop souvent abusif » de la rétention des migrants

Publié le : 29/06/2017

La Croix nouveau

Dans leur rapport annuel sur les centres de rétention, six associations sonnent l’alarme sur un usage massif et abusif, selon elle, de l’enfermement des migrants, qui a concerné près de 46 000 personnes en 2016.

 

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Dans le centre de rétention du Canet, à Marseille, en janvier 2014. / ANNE-CHRISTINE POUJOULAT/AFP

 

Mardi 27 juin, à l’occasion de la publication de leur rapport annuel sur les centres et lieux de rétention administrative, les six associations (Assfam, Forum-Réfugiés-Cosi, France Terre d’Asile, Cimade, Ordre de Malte, Solidarité Mayotte) habilitées à intervenir dans ces zones, ont annoncé qu’elles allaient interpeller le président de la République, le gouvernement et les parlementaires pour leur demander un « changement de cap ».


La moitié des enfermements en métropole

 

Elles dénoncent un usage « toujours massif et trop souvent abusif » de la rétention,destinée à enfermer, durant 45 jours maximum, un étranger qui fait l’objet d’une décision d’éloignement, dans l’attente de son expulsion.

En 2016, estime Jean-Claude Mas, secrétaire général de la Cimade, la France est restée « parmi les pays qui utilisent le plus la rétention », avec 45 937 étrangers enfermés dans les 24 centres de rétention administratives (CRA), ou les 26 locaux de rétention (situés dans des commissariats). Un rythme comparable à 2015 en dépit de l’adoption de la loi du 7 mars 2016 dite « relative aux droits des étrangers ».

 

L’an dernier, 53 % des placements en rétention (plus de 24 000 au total) ont eu lieu en métropole, en dépit d’une baisse de 13 % « principalement imputable à l’état d’urgence » qui a occasionné des fermetures et des réductions de capacité de certains centres, « conséquence de la réaffectation d’effectifs policiers vers d’autres missions ». Outre-mer en revanche, les placements (22 000 en tout) sont en nette hausse, notamment à Mayotte, qui totalise à elle seule 43 % du total national.


Une année record pour l’enfermement d’enfants

 

En particulier, l’année 2016 a été une « année record » pour la rétention des enfants, avec 4 505 enfants enfermés dont 4 325 à Mayotte, où cet enfermement s’exerce « en violation de tous les standards du droit interne comme européen », déplore le rapport. Et cela en dépit de la condamnation de la France à cinq reprises par la Cour européenne des droits de l’homme et de l’engagement de François Hollande d’y renoncer. Entre 2015 et 2016, le nombre d’enfants enfermés a augmenté de plus de 70 % et ceci alors que « l’enfermement peut être profondément traumatisant pour les enfants ».


Un taux d’exécution très variable

 

Or, selon le rapport, « les résultats de la rétention questionnent sa finalité ». Ainsi, en métropole, 53,6 % des personnes placées en rétention ont été libérées avant éloignement, du fait, souvent, d’une procédure bancale.

Toutefois, 41 103 éloignements forcés (dont 28 142 rien qu’en outre-mer) ont tout de même eu lieu en 2016, mais un certain nombre l’a été hors rétention (aides au retour, expulsions sans passer par la rétention…). En métropole, par exemple les autorités n’ont procédé qu’à 9 440 expulsions depuis un lieu de rétention, soit un taux de reconduite de 44 % seulement.

De plus, les premières nationalités expulsées sont les Albanais et les Roumains, deux nationalités qui peuvent circuler sans visa (à certaines conditions pour les Albanais) en Europe. Outre-mer, où l’accès au juge est plus difficile, le taux d’exécution atteint 67 % en Guadeloupe et Guyane.


Renvoi vers des pays à risque

 

Enfin, les associations font le constat « d’une année marquée par la multiplication des pratiques abusives de la part de l’administration ». Et de citer « des préfectures qui éloignent malgré un recours suspensif » ou « des procédures judiciaires souvent illégales aux alentours de Calais et sur tout le littoral nord » notamment « l’utilisation de la rétention pour éloigner les personnes migrantes des zones de campement ». Elles citent aussi « des expulsions hors Union européenne de personnes qui y jouissent pourtant d’un droit au séjour ».

Le rapport déplore enfin « des tentatives ou des exécutions de renvoi vers des pays à risques ». Ainsi, en 2016, « 13 personnes originaires d’Afghanistan, du Soudan et d’Irak ont effectivement été éloignées vers leurs pays d’origine ».

 

Par La Croix, le 27/06/2017