De février à mai 2021, Claire Audhuy, artiste, écrivaine et metteuse en scène, était présente dans le Pas-de-Calais, dans le cadre d’une résidence artistique (le CLEA, Contrat Local d’Education Artistique) portée par la Communauté d’Agglomération du Pays-de-Saint-Omer et soutenue par la Direction des Affaires Culturelles des Hauts de France. 

C’est dans ce contexte qu’elle a rencontré des mineurs isolés étrangers pris en charge par l’établissement d’accueil et d’accompagnement vers l’autonomie de France terre d’asile à Saint-Omer. De cette rencontre est née une pièce documentaire, « J’ai rêvé que mon pull était ma maison », composée de poèmes écrits à partir de leurs témoignages.

De l’écriture d’un livre …

Afin d’établir un lien de confiance, l’artiste a passé, à l’occasion des visites à domicile, plusieurs soirées avec les jeunes accompagnés par l’association, à discuter, échanger, cuisiner... Ces rencontres ont permis notamment aux jeunes d’être suffisamment à l’aise pour se confier et livrer leurs états d’âme.

Chacun a pu s’exprimer librement, à travers l’écrit ou l’oral ; pour certains cela a été l’occasion d’exprimer de la souffrance, de la colère, de donner leur point de vue, de dénoncer une injustice… Pour d’autres, de parler de leur voyage, de leur famille restée au pays, de leurs passions, de leur quotidien… Beaucoup ont découvert le plaisir de l’écriture, comme un moyen de décharger, d’évacuer leurs émotions.

En bref, parler ou écrire est devenu un moyen d’apprivoiser ses doutes, de dompter ses souffrances... L’écriture s’est inscrite dans un travail cathartique, un travail introspectif qui, métaphoriquement, revenait à s’envoyer une lettre à soi-même.

Claire a majoritairement utilisé Google translate pour communiquer avec les jeunes qui, pour la plupart, ne parlaient ni anglais, ni français. En est ressortie une série d’expressions ou de mots dont la grammaire n’était pas correcte. Elle a ensuite utilisé ces néologismes comme matière poétique dans son livre intitulé «  J’ai rêvé que mon pull était ma maison », dans lequel sont compilés les récits de vie des jeunes accompagnés par France terre d’asile, sous forme de poésie documentaire, ainsi que des photographies de leurs téléphones.

Crédit image : Baptiste Cogitore 

… à la réalisation d’un spectacle. 

Parallèlement à ce travail, Claire a mis en scène et en musique ces récits, avec une classe de cinquième du collège de la Morinie (Saint-Omer), leur professeure Marie Berrier et Achille Nzoda, intervenant social animateur à France terre d’asile. Le chœur des collégiens a pris le nom de « Fuir-s’en-va », en référence à l’un des néologismes évoqués dans son livre. Plusieurs représentations publiques ont été données en mai 2021 et cinq vidéos ont été tournées. Les mineurs isolés étrangers participants au projet ont ainsi pu découvrir, avec émotion, leurs mots, leurs histoires, chantés et récités par les jeunes collégiens.

Les vidéos du spectacle sont disponibles ici. Elles ont été filmées au théâtre Le moulin à Café à Saint-Omer. 

Par ailleurs, le projet continue d’évoluer vers de nouveaux horizons : un grand spectacle est en train d'être répété avec les mêmes élèves du collège de la Morinie, qui sont désormais en classe de 4^ème. Les représentations se dérouleront le 5 avril 2022, à la salle Balavoine, à Arques, avec la musicienne Alexandrine Guédron.

Visites à domicile au sein des appartements avec Claire Audhuy

«  Plusieurs fois par semaine, j'ai accompagné leur éducateur Achille dans la tournée des appartements où ils vivent seuls, à deux ou à trois. J'ai passé des soirées dans leur intimité pour nous apprivoiser mutuellement », se souvient-elle. Elle y découvre des jeunes gens autonomes, «  dans l'efficacité permanente. Ils mettent le réveil, vont à l'école, font leurs courses, cuisinent, s'occupent de tout… Quel ado fait ça ? »

CLAIRE AUDHUY ( Extrait d’un article de L’Indépendant, à retrouver ici)