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En attente d'une décision, ils ne peuvent s'intégrer

Publié le : 14/05/2010

Carcassonne. «Se reconstruire en exil, sans travail...»

Dans l'attente d'une réponse quant à leur statut, les adultes ne peuvent pas s'intégrer. Leurs enfants, oui, grâce à la scolarisation.

« Faire en sorte que le temps d'attente soit porteur de sens sans perdre de vue qu'il s'agit pour eux d'une parenthèse dont l'issue est incertaine ».


Voilà un bout du projet d'établissement du centre d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) de Lagrasse. Sachant que les réfugiés, dans l'attente d'une réponse de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ou de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), ne peuvent ni travailler, ni se former, sachant aussi qu'en cas de recours auprès de la CNDA, le temps d'une convocation peut s'étirer d'un an à quatre ans, la « parenthèse » est source de stress. « Les femmes trouvent toujours de quoi s'occuper : le logement, les enfants et leur scolarisation. Mais pour les hommes qui étaient actifs c'est très difficile », souligne Caroline Spoli, chargée de l'aide au montage et du suivi des dossiers de procédure de demande d'asile.


 « Se reconstruire en exil, sans travail... C'est ardu. Les hommes perdent leur statut au sein de la famille », ajoute Denis Vaya, le directeur du centre. Vu les besoins en main-d'œuvre lors des vendanges, le responsable a déjà tenté une demande de dérogation auprès du préfet. Sans succès. « Lorsque nous avions accueilli les Kosovars en 1999, des autorisations avaient été accordées. Cela avait été vécu comme un bol d'air pour les résidents et les vignerons », se souvient-il. Nimon Zekaj et Betjullari Pollomi, deux réfugiés kosovars randonnent pour chasser les idées noires : « Quand le moral est au plus bas, on part marcher », disent-ils. Les liens sociaux de voisinage qui se créent entre les familles participent aussi à cet oxygène nécessaire. Et puis, il y a le jardin. Mises à la disposition par la commune le long de l'Orbieu, les parcelles sont cultivées par les familles qui le souhaitent. De quoi varier l'ordinaire, plutôt chiche, avec des productions légumières au fil des saisons. Histoire de changer d'air et de faire les courses, certains résidents filent en bus à Lézignan, le mercredi matin, jour du marché .

Des rêves et des projets

Grâce à la scolarisation, à l'école de Lagrasse, le collège de Lézignan ou le lycée de Narbonne, seuls les enfants et les adolescents du CADA vivent comme tous les mômes de leur âge, apprennent le français à la vitesse grand V, font des rêves et des projets. Lorsque les gamins rentrent de cours, Loïc Lépine, autre salarié du centre, est présent et disponible pour l'aide aux devoirs. Le mercredi après-midi, ce sont les collégiens qui le sollicitent, qui pour un exposé, qui pour des recherches sur internet, à l'instar d'Achot, ce jeune Arménien lycéen à Gustave Eiffel.


Quand on l'a croisé aux côtés de Loïc, il planchait sur un exposé à présenter en classe : « J'ai choisi de parler du génocide arménien parce que c'est ma culture, pour expliquer d'où je viens ». Le quoditien des familles, c'est également le suivi santé. Le bilan à l'entrée et à la sortie du centre est obligatoire. Entre les deux, de nombreux soins sont souvent nécessaires : « Certains arrivent dans des états physiques et psychologiques très faibles », note Denis Vaya. À la fin de la journée, on a revu Achot, en short et en maillot, ballon rond au pied. Le foot, c'est son dada. Comme son frère jumeau, Artak, il joue sous les couleurs de l'équipe des seniors de Lagrasse.


Par Céline SAMPEREZ6BEDOS


La Depeche.fr, le 12/05/2010