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Publié le : 10/09/2018
Le mardi 04 septembre 2018
La tenue d’audiences délocalisées à proximité immédiate de la zone d’attente (ZA) de Roissy a depuis toujours soulevé des objections de la part d’un certain nombre d’associations. Par un arrêt du 11 juillet 2018 (req n° 18-10 062), la première chambre civile de la cour de cassation vient de les écarter avec une motivation qui mérite qu’on s’y arrête.
Dans cette affaire, le JLD avait statué, dans la salle d’audience attribuée au ministère de la justice, sur le maintien en ZA, pour une durée de huit jours, d’un vénézuélien arrivé le 27 octobre 2017 à Roissy. Le premier président de la cour d’appel de Paris avait confirmé le 30 octobre 2017 l’ordonnance du JLD.
Pour critiquer l’ordonnance, l’intéressé et les associations intervenues à son soutien invoquaient la violation de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles 5 et 6 § 1 de la CEDH et de l’article 14 § 1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. En substance, ils soutenaient que la salle d’audience de Roissy ne donnait pas l’apparence d’une justice indépendante et impartiale car elle était située dans l’enceinte de la zone d’hébergement d’une ZA, dans le même bâtiment qu’une partie des locaux de la zone d’hébergement d’une ZA, car la sécurité des audiences était pour partie assurée par des agents de la police aux frontières et car son administration et son financement étaient assurés par le ministère de l’intérieur.
À la suite de l’ordonnance, l’arrêt écarte le premier grief au motif que l’accès au bâtiment judiciaire ne pouvait se faire, pour le public, que par la porte principale au-dessus de laquelle figure la mention « Tribunal de grande instance de Bobigny Annexe » et, pour les personnes maintenues en ZA que par un passage extérieur situé en territoire français conduisant à une porte signalée par l’inscription « Tribunal » dans les six langues officielles de l’ONU. Dans ces conditions, la proximité immédiate entre les locaux de la ZA et la salle d’audience était exclusive d’une installation de celle-ci dans l’enceinte de la ZA.
Il rejette le deuxième grief au motif que la salle d’audience était placée sous l’autorité fonctionnelle du ministère de la justice et, localement, des chefs de juridiction, seuls à décider des modalités du contrôle des entrées confié à des agents des CRS.
Il rappelle en troisième lieu que la localisation de la salle d’audience dans la zone aéroportuaire découle d’une loi validée par la décision n° 2003-484 DC du Conseil constitutionnel du 20 novembre 2003 sous la réserve d’un aménagement de cette salle devant garantir la clarté, la sécurité, la sincérité et la publicité des débats. Au § 81 de sa décision, le Conseil constitutionnel avait en effet jugé « qu'il résulte des travaux parlementaires qu'en autorisant le recours à des salles d'audience spécialement aménagées à proximité immédiate des lieux de rétention ou à des moyens de télécommunication audiovisuelle, le législateur a entendu limiter des transferts contraires à la dignité des étrangers concernés, comme à une bonne administration de la justice ; que, par elle-même, la tenue d'une audience dans une salle à proximité immédiate d'un lieu de rétention n'est contraire à aucun principe constitutionnel ; qu'en l'espèce, le législateur a expressément prévu que ladite salle devra être « spécialement aménagée » pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats et permettre au juge de « statuer publiquement ». Dans ces conditions confirme la Cour de cassation, l’installation de cette salle à proximité de la ZA répond aux exigences de l’article L.222-4 du CESEDA.
Il souligne en quatrième lieu que les avocats et les parties ont accès au dossier pour préparer la défense des personnes en ZA dès l’ouverture de la salle, disposent de locaux garantissant la confidentialité des entretiens et d’une salle de travail équipée qui leur est réservée de telle sorte que les droits de la défense peuvent s’exercer effectivement.
Il relève enfin qu’ayant apprécié les conditions d’exercice de la justice au regard de la nature de ce contentieux soumis à de brefs délais imposés par la loi et estimé que rien n’établissait que ces conditions étaient meilleures au siège du tribunal, le premier président, constatant l’existence d’un juste équilibre entre les objectifs poursuivis par l’Etat et les moyens utilisés par ce dernier pour les atteindre, a exactement retenu que le juge qui avait tenu l’audience dans la salle située à proximité de la ZA avait statué publiquement et dans le respect des prescriptions légales et conventionnelles.