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Zoom sur l’Orspere-Samdarra : Prendre en compte la santé mentale des personnes exilées

Publié le : 24/05/2024

Cet article est issu de la Lettre de l'asile et de l'intégration, newsletter bimestrielle de France terre d'asile qui propose un éclairage sur des problématiques liées à l'asile et l’intégration en France. Inscrivez-vous pour la recevoir !

 

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L’ Observatoire Santé mentale, Vulnérabilité et Sociétés (Orspere-Samdarra) met en lumière les problématiques de santé mentale qui touchent les personnes en situation de précarité, et notamment les personnes en exil.

Les personnes migrantes sont à la croisée des problématiques de santé mentale et de précarité. L’instabilité de leur situation dans le pays d’accueil et leur parcours d’exil sont souvent sources de souffrance mentale, voire de traumatismes.

L’Orspere-Samdarra cherche à promouvoir une meilleure prise en charge sanitaire et sociale des publics vulnérables, et notamment des personnes exilées. L'observatoire organise des formations et événements à destination des professionnels, des personnes concernées et du grand public, et met à disposition des ressources variées (coordinations, permanence téléphonique, soutien psychosocial, films d’animation, guides…). Il alimente également la recherche dans le champ de la santé mentale et de l’intervention sociale, et publie une revue consacrée aux problématiques de santé mentale et précarité, Rhizome, disponible gratuitement.

Des « facteurs de stress post-migratoires » aggravant les souffrances liées à l’exil

Les personnes migrantes sont largement surreprésentées dans les populations souffrant de psychotraumatismes et de troubles dépressifs¹, par rapport à la population générale. Gwen Le Goff, directrice adjointe de l’Orspere-Samdarra, explique : « La migration, l’expérience des procédures, de l’attente, des discriminations, de la précarité sociale, sont aujourd’hui considérées comme des facteurs majeurs de vulnérabilisation pouvant entraîner une souffrance psychique d’origine sociale ou psychosociale importante ». Ces « facteurs de stress post migratoires » s’ajoutent à de potentiels événements traumatiques déjà subis par la personne exilée, dans le pays d’origine ou au cours du parcours migratoire, et ralentissent le processus de rétablissement.

Le public exilé fait face à de nombreuses difficultés dans l’accès à une prise en charge en santé mentale, imputables à une « inadéquation entre les besoins et l’offre de soins ». La barrière de la langue, mais aussi les représentations que peuvent se faire les personnes migrantes de la santé mentale freinent notamment l’accès aux soins. Du côté des professionnels de la santé mentale, Gwen Le Goff regrette un « manque de sensibilisation » sur l’accompagnement des personnes exilées.

 

Bien accueillir, former les professionnels et impliquer les personnes migrantes

L’Orspere-Samdarra insiste ainsi sur le rôle que joue la politique d’accueil dans le soin des troubles en santé mentale, mais aussi leur prévention. Pour Gwen Le Goff, « l’hébergement et l’accompagnement sont deux dimensions fondamentales » pour prévenir les situations traumatogènes, comme le fait de devoir vivre à la rue, et les violences qui peuvent en découler.

Au cours d’une Journée d’étude qui s’est tenue le 14 mai 2024, l’observatoire a notamment mis en avant le cas des mineurs isolés étrangers et des jeunes migrants. Les troubles de la santé mentale qui touchent ces jeunes sont aggravés par une politique d’accueil parfois inadaptée, et la précarité dans laquelle peuvent être plongés ceux qui attendent plusieurs mois la reconnaissance de leur minorité par le juge des enfants, sans solution d’hébergement. Or, pour ce public particulièrement vulnérable, « on peine à trouver des réponses adaptées », déplore Gwen Le Goff.

L’observatoire plaide également pour une intégration des problématiques de santé mentale à tous les niveaux de l’accueil et de l’accompagnement. La formation des intervenants sociaux, en tant qu’acteurs de première ligne, est un enjeu majeur. Mais il faut pour cela qu’ils « aient les conditions de travail pour que ce soit possible ». Le cycle de formation « Prisme – Précarité et santé mentale » à destination des professionnels accompagnant des publics en situation de précarité et proposé par l’observatoire jusqu’en 2026, vise à améliorer l’accompagnement en santé mentale des personnes en situation de précarité.

Rendre possible le soin pour les personnes exilées passe aussi par la participation des personnes concernées à leur accompagnement. Les personnes exilées sont dotées de connaissances uniques sur la procédure d’asile et le milieu associatif, mais aussi sur l’expérience de l’éloignement de la famille et des difficultés liées à l’arrivée dans un pays étranger. L’Orspere-Samdarra assure des formations et un soutien pour permettre à des personnes exilées d’intervenir en tant que pair aidant, médiateur pair, ou interprète médiateur.

Enfin, au sein de « L’espace », l’Ospere-Samdarra propose depuis 2020 un accueil à destination des personnes migrantes, pour des activités conviviales et des échanges accompagnés par une équipe pluridisciplinaire, comptant notamment des médiateurs ayant une expérience de la migration. Ces derniers jouent un rôle important dans la dé-stigmatisation de la santé mentale et la libération de la parole.

Face à l‘augmentation des besoins de prise en charge sanitaire et sociale des publics vulnérables et à la précarisation croissante des personnes migrantes sur le territoire national, l’Orspere-Samdarra entend poursuivre son action de sensibilisation, de formation des professionnels et de prise en charge des personnes exilées.

 

¹ Blackmore R., Boyle J.A., Fazel M. et al. (2020), « The prevalence of mental illness in refugees and asylum seekers: A systematic review and meta- analysis », PLoS Med, 17(9): e1003337

Histoire de l’Orspere-Samdarra

Basé à Bron (métropole de Lyon), l’Observatoire régional de la souffrance psychique en rapport avec l’exclusion (Orspere) est créé en 1996 par Jean Furtos, psychiatre, et Christian Laval, sociologue. Revendiquée dès sa création, l’interdisciplinarité de l’observatoire est renforcée en 2013 par la fusion avec le Réseau Santé mentale, précarité, demandeurs d’asile et réfugiés en Rhône-Alpes (Samdarra), un centre de ressources destiné aux professionnels et bénévoles de l’accueil, de l’accompagnement et du soin des personnes réfugiées et demandeuses d’asile.

L’Orspere-Samdarra est aujourd’hui hébergé au Centre hospitalier le Vinatier (Bron, métropole de Lyon), et se divise en trois pôles : Recherche, Ressource et Édition.