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Publié le : 01/01/2014
Victor Spirescu, ressortissant roumain, ne s’attendait sans doute pas à pareil accueil lors de son arrivée à l’aéroport de Luton, le 1er janvier. Deux députés, un travailliste et un conservateur, étaient présents à sa descente d’avion. Ils étaient venus «observer» par eux-mêmes les effets de la levée des dernières restrictions de l’accès au marché du travail de l’UE, dont celui de la Grande-Bretagne, pour les ressortissants roumains et bulgares. Ce 1er janvier, ils n’auront pas vu grand-chose. Victor Spirescu, employé de la construction gagnant 10 euros par jour en Roumanie et espérant des jours meilleurs au Royaume-Uni, était l’un des seuls passagers répondant à ce scénario, tous les autres étaient des Roumains déjà installés en Grande-Bretagne, qui revenaient au pays après avoir passé les fêtes dans leur famille.
Qu’importe, Victor Spirescu a fait la «une» des médias britanniques depuis son arrivée, incarnant la crainte d’une partie du pays de voir des hordes de travailleurs de l’Est envahir l’Albion, voler leur travail ou profiter des fonds déjà malmenés de la sécurité sociale. Le thème fait débat depuis des mois au Royaume-Uni, où le gouvernement conservateur, à l’approche d’échéances électorales, est mis sous pression par le parti antieuropéen UKIP. Malgré le courroux de Bruxelles, David Cameron a fait passer à la hâte des réglementations pour empêcher les immigrants de l’UE de réclamer des aides de l’Etat dès leur arrivée.
Ces mesures ne calment pas les esprits. Un groupe de conservateurs presse le gouvernement de faire voter un amendement prolongeant de quatre ans les restrictions d’accès au marché du travail britannique pour les Bulgareset les Roumains. La presse populaire, qui au passage confond allègrement Roms et Roumains, continue aussi de se déchaîner. «De nouveaux migrants pourraient coûter des milliards au Royaume-Uni», titrait hier le site du Daily Express, l’un des titres ayant mené une virulente campagne contre les ressortissants de l’Est.
Selon les experts, il ne faut pas s’attendre à une vague d’immigration, quatre millions de Roumains et Bulgares travaillant déjà dans l’UE. Mais la peur est en partie liée à la politique menée par le gouvernement en 2004, qui n’avait pas pris de mesures transitoires lors d’une précédente ouverture du marché du travail à plusieurs nouveaux membres de l’UE. Le Royaume-Uni avait alors connu une brusque augmentation du nombre de migrants de l’Est sur son territoire.
La dissuasion britannique pour contrer la libre circulation des Roumains et des Bulgares, à l’encontre de tous les principes de l’UE, semble prête à faire desémules ailleurs en Europe. En Bavière, la CSU, soutenue par une campagne du journal populaire Bild, vient de proposer des mesures identiques, pour empêcher «le tourisme social» des ressortissants de l’Est. La Suisse, qui s’est donné la possibilité d’activer la clause de sauvegarde jusqu’en 2019 concernant Bulgares et Roumains, n’échappe pas au réveil du spectre. L’initiative de l’UDC «Contre l’immigration de masse», soumise au peuple le 9 février, vise à torpiller les accords bilatéraux avec l’UE sur la libre circulation des personnes.
Roumains et Bulgares peuvent désormais travailler dans toute l’UE. L’eurosceptique Royaume-Uni en fait toute une affaire.
Le 3 janvier 2014, La Tribune de Genève