Amendes, emprisonnement, lynchages publics… De peur d’être arrêtées et condamnées par les autorités ou agressées par des voisin·es ou des proches, de nombreuses personnes LGBTI+ sont forcées de fuir leur pays.
Dans une série de portraits issus de deux expositions, des personnes réfugiées LGBTI+ livrent les raisons de leur départ, leurs espoirs et le soulagement qu’elles ont ressenti à l’arrivée en France.
1000 DREAMS
Exposition collective de l'ONG Witness Change avec la participation du photographe Mirza Durakovic.
A découvrir jusqu’au 7 juin 2024 à la Fondation de l’Allemagne - Maison Henrich Heine à Paris.
Céline Rodriguez Cairo, 38 ans, réfugiée d'origine cubaine
« Avant de quitter Cuba, mon rêve était d’avoir une vie meilleure... d’être acceptée dans la société et de jouir de mes droits », explique Céline Rodriguez Cairo (38 ans), une réfugiée cubaine transgenre qui vit actuellement à Paris. À Cuba, raconte-t-elle, elle a été condamnée à des amendes, arrêtée et battue en raison de son identité de genre, « les gens m’ont crié dessus, m’ont jeté des pierres » et « tous les jours, je ressentais que ma vie n’avait pas de futur ». En 2018, elle a fui pour Paris. « C’était comme une renaissance » : ainsi décrit-elle le moment où elle a appris que sa demande d’asile avait été approuvée. « J’avais l’impression de pouvoir m’établir ici en France, et que... les gens allaient m’accepter ». En dépit de son optimisme initial, elle précise que les discriminations sur le marché du travail ont affecté sa santé mentale et qu’elle a commencé à souffrir de crises d’agoraphobie.
Elle a toutefois trouvé un emploi de femme de ménage à domicile, et elle est désormais impliquée dans plusieurs organisations militantes. « Ma vie se poursuivra avec ma lutte contre les discriminations, conclut-elle. Je suis forte car j’ai traversé beaucoup d’épreuves ».
Yosef, 36 ans, réfugié d'origine russe
« Mon rêve est toujours d’être chanteur ». Yosef (36 ans) est un réfugié et activiste LGBTQI+ russe qui vit en France. « J’ai travaillé dans plusieurs associations de défense des droits humains en Russie. J’ai été la cible de menaces. À cause de cela, j’ai décidé de quitter mon pays... Je l’ai aussi quitté pour pouvoir aimer librement ». Il explique comment il s’est senti au moment du départ : « je n’ai presque rien ressenti, comme dans une situation de guerre. On n’a pas le temps de ressentir quoi que ce soit, on est juste dans l’action ». À son arrivée en France, cependant, il a vécu un « grand stress. J’avais l’impression d’être entre deux mondes. Et, au fond de moi, je ne suis ni en Russie, ni en France ». Pour tenir, Yosef déclare avoir « beaucoup écrit. Et j’ai parlé avec Dieu ». Il attribue sa force à Dieu. « Pour moi, c’est grâce à Dieu que je peux vivre, faire des choses... Dieu est la force qui m’habite ». Yosef apprend aujourd’hui le français pour pouvoir étudier le théâtre à l’université.
Il aime ce que lui fait ressentir la création artistique : « je me sens vivant, heureux. Je ressens l’amour... et la passion ».
BANNIS
Exposition du photographe Quentin Houdas, visible en ligne.
Jesca, 45 ans, réfugiée d'origine ougandaise
« Je m’appelle Jesca, j’ai 45 ans et je suis ougandaise. Je suis arrivée en France le 13 août 2016 après avoir été persécutée dans mon pays à cause de mon orientation sexuelle. Si tu es homosexuelle en Ouganda, le danger rôde partout et menace à chaque instant. D’un point de vue traditionnel, religieux, social et politique, tout nous est hostile. Tu es homo à tes propres risques.
Omid, 26 ans, réfugié d'origine iranienne
« Je m’appelle Omid, j’ai 26 ans et je viens d’Iran. Dans mon pays, tout le monde à tendance à se mêler des affaires du voisin, la liberté n’existe pas en public. Par exemple, si tu te promènes avec une fille et que vous semblez intimes, on risque de vous contrôler, de vérifier que vous êtes bien mariés ou de la même famille ; si ce n’est pas le cas, on vous embarque.
En privé, les jeunes font la fête, on boit de l’alcool, on danse, les filles retirent leur voile, on écoute de la musique ; je n’ai d’ailleurs pas perçu tellement de différences en arrivant en France. Seulement, en Iran, tout cela reste interdit. Si le voisin est en mauvais termes avec vous et qu’il entend la musique, il peut vous dénoncer et la police intervient, elle fouille l’appartement et vous emmène.