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Publié le : 28/06/2010
La France accuse pourtant "un certain retard dans la mise en place d'alternatives à l'enfermement" de ces personnes, constate l'organisation de défense des droits des étrangers, en estimant que "le temps est peut-être venu aujourd'hui de se lancer dans la recherche et la mise en place de pratiques innovantes, plus respectueuses des droits de l'Homme".
C'est ce à quoi elle s'attache dans cette étude, réalisée avant le 1er janvier 2010, date à laquelle elle a débuté sa mission d'aide juridique dans les centres de rétention de Plaisir, Coquelles, Palaiseau et Oissel.
"Ces premiers mois d'activité ont confirmé nos préoccupations concernant l'usage de la rétention des étrangers en France", indique d'ailleurs le directeur général de FTDA, Pierre Henry, en introduction à ce document, publié en juin dans sa collection Les Cahiers du social.
"En 2008, quelque 75 000 étrangers auront eu de la France l’expérience d’un enfermement administratif", note en effet ce rapport, en ajoutant que cette "pratique, en progression en France, en Europe et ailleurs, soulève des inquiétudes au sein de diverses instances internationales".
Car, seulement destinée à "faciliter le départ du territoire d’étrangers qui n’ont pas le droit d’y entrer ou d’y séjourner et non à sanctionner la commission d’une infraction pénale", elle implique cependant "une atteinte à la liberté d’aller et venir" et ne doit donc "être mise en oeuvre qu’en cas d’absolue nécessité et compte tenu des situations individuelles", selon FTDA.
Un principe d'ailleurs proclamé par les textes internationaux ratifiés par la France et ses partenaires européens mais, "dans les faits, la réalité est différente" et la rétention, "une pratique systématique". Et ce, malgré les rappels à l'ordre de différents organismes internationaux comme le Conseil des Nations unies pour les droits de l'Homme, ou "les tentatives de la Commission européenne d’encadrer la rétention des demandeurs d’asile", qui "se heurtent à l’opposition de la majorité des Etats membres de l’Union européenne".
La France n'est pas en reste puisque si "les pratiques [y] sont relativement plus libérales, le projet de loi sur l’immigration, l’intégration et la nationalité présenté en conseil des ministres le 31 mars 2010 entend durcir le régime de rétention des étrangers", déplore à cet égard l'association.
"Cette étude appelle ainsi à une refonte de la politique de rétention, en particulier, et de la politique d'immigration, en général", souligne donc Pierre Henry, en jugeant que "la tendance observée actuellement en France et en Europe n'est pas inéluctable à condition que l'ensemble des forces de défense des libertés fondamentales et des droits de l'Homme s'engage dans le débat".
Un débat auquel l'association verse donc cette étude, qui décrit en premier lieu le cadre juridique international et européen de la rétention, dont elle assure d'ailleurs qu'aucun texte international n'en "réglemente de manière directe l'usage par les gouvernements".
Les conditions d'exercice de la rétention administrative en France et en Europe sont également détaillées dans ce document, avant que l'association n'en vienne à l'examen de diverses mesures alternatives à la rétention, qui "sont, par principe, moins intrusives, moins restrictives des libertés des étrangers concernés que l'enfermement en centre de rétention".
Pourtant, si elles existent déjà dans la plupart des pays concernés par des phénomènes migratoires d'envergure, "elles ne sont que très peu utilisées", relève cette étude comparative, menée par un groupe de travail réunissant une douzaine de membres de l'association.
Et lorsque les Etats y recourent, "leurs critères de sélection sont extrêmement restrictifs et peu de personnes peuvent en bénéficier", ajoute France terre d'asile, qui précise que, dans les quatre pays étudiés - l'Australie, le Canada, les Etats-Unis et le Royaume-Uni -, "la mise en place d'alternatives répond plus à une volonté pragmatique de désengorger les centres de rétention qu'à éviter aux étrangers l'expérience de l'enfermement".
Plusieurs modèles de solutions alternative à la rétention administrative sont ainsi passés à la loupe, qu'il s'agisse de la délivrance de documents de séjour et/ou de l'admission temporaire, de l'obligation de présentation régulière aux autorités, de la libération conditionnelle, du cautionnement ou de la désignation d'un garant, du placement en centres ouverts ou semi-ouverts, ou encore de l'assignation à résidence, de l'aide au retour volontaire ou de la surveillance électronique.
Plus fondamentalement, il est urgent de rétablir le rôle du juge judiciaire dans la décision de priver de liberté ou non des étrangers en situation irrégulière, conclut France terre d'asile, y compris dans le cadre des mesures alternatives à la rétention, qu'il convient de développer, en privilégiant les solutions qui entraînent une atteinte "minimale à la liberté de mouvement et à la routine quotidienne".
Dans cette hypothèse, les garanties de représentations que pourrait exiger le juge devraient bénéficier de l'expérience existante, en exigeant le passeport éventuellement, mais même en l'absence de ce dernier, "il doit être possible", pour l'étranger sans papiers, "de passer une sorte de contrat de bonne foi avec le juge".
De manière générale, enfin, plusieurs catégories d'étrangers devraient bénéficier d'"une présomption favorable", la première étant les enfants et les familles avec enfants, selon France terre d'asile, qui évoque aussi "toute une variété de situations vulnérables où la simple humanité jointe à la difficulté d’assurer un mode d’existence en établissement devrait condamner la rétention, notamment pour les personnes malades, handicapées ou victimes d’un traumatisme".
"Quelles alternatives à la rétention administrative des étrangers ?", Les Cahiers du social n° 26, juin 2010, à retrouver dans nos publications.
A.S.
Actualités sociales hebdomadaires, 28/06/2010