©Tandem-Réfugiés
Cet article est issu de la Lettre de l'asile et de l'intégration, newsletter bimestrielle de France terre d'asile qui propose un éclairage sur des problématiques liées à l'asile et l’intégration en France. Inscrivez-vous pour la recevoir !
En 2022, la demande d’asile en Europe a augmenté, retrouvant son niveau d’avant la pandémie en France. Les personnes afghanes sont les plus nombreux à demander l’asile et à l’obtenir bien que leur taux de reconnaissance soit en baisse.
La demande d’asile en France en 2022 a poursuivi sa reprise d’après Covid : les Guichets uniques pour demandeurs d’asile (Guda), qui effectuent l’enregistrement des demandes d’asiles, ont enregistré 155 773 demandes – dont 136 724 primo-demandes, ce qui représente une hausse de plus de 28% par rapport à 2021. Parmi ces primo-demandes on retrouve 29 446 demandes placées en procédure Dublin, c’est-à-dire des personnes dont la demande a initialement été déposée dans un autre État membre ou dont les empreintes ont été prises dans un autre Etat membre.
Les demandes enregistrées par l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra), qui statue en première instance sur les demandes d’asile sont légèrement inférieures avec 131 254 demandes – dont 114 588 primo-demandes. La différence tient au décalage entre le passage en Guda et à l’Ofpra, aux personnes en procédure Dublin dont la demande ne sera finalement pas examinée par la France ou aux abandons en cours de procédure. Au niveau de l’Ofpra, une hausse de 27,2% des demandes d’asile a également été enregistrée par rapport à 2021, mais le nombre de demandes reste légèrement inférieur à 2019 (où il était de 132 826).
Cette augmentation s’inscrit dans la tendance européenne, 962 160 personnes - dont 881 220 primo-demandeurs – ont sollicité une protection internationale dans les 27 États membres de l’Union européenne (UE) en 2022, soit une hausse de près de 52 % par rapport à 2021. Les États membres qui ont accueilli le plus de demandeurs d’asile étaient l’Allemagne, la France et l’Autriche, qui dépasse pour la première fois l’Italie. Au niveau français, comme européen, ces chiffres n’incluent pas les déplacés d’Ukraine puisque ces derniers, près de 70 000 en France et 4 millions dans l’UE, relèvent du régime de la protection temporaire et non de la demande d’asile.
Selon les premiers chiffres publiés par l’Agence européenne pour l’asile (EUAA), l’augmentation des demandes d’asile se poursuit en 2023 au niveau européen : 519 000 demandes ont été enregistrées au 1er semestre 2023, soit 28 % de plus que sur la même période en 2022. L’Allemagne demeure le premier pays de destination.
@ Rapport d’activité 2022 de l’OFPRA
© Rapport d’activité 2022 de l’OFPRA et Eurostat.
L’augmentation du nombre de demandes s’accompagne cependant d’un recul des décisions rendues par l’Ofpra. En effet, l’institution a rendu près de 4% de décisions de moins qu’en 2022. Le déstockage des dossiers déposés les années antérieures s’est ainsi poursuivi mais plus lentement qu’en 2021. À l’échelle européenne, la France représente 16% des demandes en attente à la fin de 2022.
Les personnes afghanes toujours en tête des demandes d’asile
Parmi les personnes demandant l’asile en France et dans l’UE en 2022, 70 % étaient majeures. En France près de 64 % étaient des hommes, ce chiffre croît à 70 % à l’échelle européenne. Toutefois, le nombre de femmes introduisant des demandes de protection en France et dans l’UE a augmenté respectivement de 38 % et 54 % par rapport à 2021, avec 46 810 demandeuses d’asile en France et 257 655 dans l’UE en 2022.
En France, 15 % des personnes sollicitant l’asile en 2022 étaient de nationalité afghane. Avec 17 103 Afghans primo-demandeurs, la demande afghane est en hausse de plus de 41 % depuis 2021, ce qui semble correspondre à l’augmentation des Afghans fuyant leur pays suite à la prise de pouvoir des talibans. Le deuxième pays de provenance des primo-demandeurs (7 % du total) est le Bangladesh (+65 % par rapport à 2021) suivi de la Turquie (7 % du total, +87 %).
La Géorgie est le quatrième pays de provenance de demandeurs d’asile en France en 2022 et celui qui connait l’augmentation la plus forte depuis 2021 (+114 %). Selon l’agence de l’UE pour l’asile (EUAA), l’exil des Géorgiens s’explique notamment par les impacts économiques et sociopolitiques importants de la guerre en Ukraine. À l’échelle européenne, les Syriens, les Afghans, les Vénézuéliens et les Turcs représentent en 2022 près de 40 % du total des primo-demandes d’asile. Ces mêmes nationalités demeurent les principales au premier semestre 2023.
© Rapports d’activité 2021 et 2022 de l’OFPRA
Principaux pays de provenance de primo-demandeurs d’asile en France et dans l’UE en 2022. © Rapport d’activité 2022 de l’OFPRA et Eurostat.
Un taux de reconnaissance en France inférieur à la moyenne européenne
Parmi ces demandes déposées à l’Ofpra, 29,2 % ont reçu une réponse positive, soit une augmentation de plus de trois points par rapport à 2021. L’institution a ainsi accordé le statut de réfugié à 31 136 personnes et la protection subsidiaire à 7 749 personnes, pour un total de près de 39 000 personnes protégées. En cela la France est le second pays (derrière l’Allemagne) à rendre le plus de décisions positives, mais son taux de protection (proportionnel aux nombres de demandes reçues) reste largement inférieur à la moyenne européenne qui se situe à 50 %. En 2022, l'Afghanistan, la Syrie, la Guinée et la Côte d'Ivoire étaient les pays d’origine de la majorité des bénéficiaires de la protection internationale en France, malgré une baisse du taux de protection des demandeurs afghans. En 2021 près de 75 % des Afghans demandant l’asile l’obtenaient, tandis qu’en 2022 ce chiffre est descendu à 69 %. Toutefois, alors qu’une majorité d’Afghans obtenaient la protection subsidiaire, en 2022, l’Office a privilégié le statut de réfugié. Par ailleurs, les plus hauts taux de protection (dépassant les 70 %) ont été observés chez les personnes originaires de Chine (notamment les ressortissants tibétains), de Syrie, d'Ukraine, d'Érythrée, du Soudan du Sud, de République centrafricaine et du Yémen. À l’échelle européenne les nationalités les plus protégées étaient les Syriens, les Afghans, et les Vénézuéliens.