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Réfugiés : à Paris, France terre d'asile tonne contre l'engorgement du système

Publié le : 19/05/2016

le point


L'association France terre d'asile a tapé du poing sur la table mercredi en annonçant qu'elle suspendait, à Paris, la prise des rendez-vous en préfecture, pour dénoncer un engorgement " invraisemblable " de l'accès à la demande d'asile. 


FTDALe centre de l'association France terre d'asile à Créteil en région parisienne, le 5 octobre 2006

" On ne peut pas travailler dans ces conditions, nous fermons jusqu'à nouvel ordre ", a annoncé à l'AFP Pierre Henry, le directeur général de l'association, en précisant que le centre chargé du pré-accueil des candidats à l'asile resterait fermé au moins mercredi et jeudi.En cause : l'engorgement de la procédure, depuis l'entrée en vigueur, le 1er novembre, de la nouvelle loi sur l'asile, pourtant censée fluidifier le système avec la mise en place d'un " guichet unique " regroupant les services de la préfecture et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii). La loi prévoit que les demandeurs d'asile obtiennent, sous trois jours, un rendez-vous en préfecture, lorsqu'ils sont reçus dans les plateformes d'accueil (ou Pada), comme celle gérée à Paris par France Terre d'asile (pour les personnes isolées, les familles dépendant d'une autre structure dans la capitale). Le problème est que " la préfecture nous octroie 50 rendez-vous par jour alors que nous avons 300 personnes qui attendent ", explique M. Henry, qui dénonce une situation " invraisemblable ", avec la formation de files d'attente devant le centre.

 " 200 euros au marché noir " 

L'association avait dans un premier temps essayé de donner des rendez-vous pour cette étape de " pré-enregistrement ". Mais ces " tickets bleus " se revendaient " 200 euros au marché noir ", explique une salariée. Et les délais d'attente ont vite atteint plusieurs mois. Depuis les files s'allongent, avec " des tensions " et " parfois des bagarres ", qui font craindre " pour la sécurité des migrants et des salariés ", selon M. Henry. " On ne peut pas gérer la sécurité sur la voie publique ", ajoute le responsable, qui s'est résolu mercredi à appeler la police lorsque des remous ont éclaté dans la file d'attente. 

" Cela fait trois semaines que je suis ici, je dors sur place, mais je n'ai pas réussi à entrer ", explique Fareez, un Afghan, dans la file de quelque 300 personnes. A ses pieds, cartons, couvertures et duvets témoignent d'un campement sauvage à même le trottoir. Son voisin, un Mauritanien se présentant sous le prénom d'Ali, assure attendre depuis cinq jours. A l'ouverture des portes, " c'est le plus fort qui entre ", selon lui.  

Le problème est que le système " a été formaté pour 8.000 demandes par an " mais que, malgré les efforts de la préfecture, " on est sur un rythme de 30.000 à 40.000 ", déplore Pierre Henry. Aussi " nous ne reprendrons pas le service dans ces conditions ", prévient le responsable associatif, en demandant l'augmentation du quota de rendez-vous et surtout la mise en place de " plates-formes régionales " pour désengorger Paris. " Il faut repenser le système de façon urgente ", affirme-t-il. Pour Gérard Sadik de la Cimade, " il faudrait 300 rendez-vous par jour ouvrable " pour ramener les délais d'attente à dix jours. " Il n'est pas normal que ce soient des organismes privés qui doivent gérer la file d'attente. " Au ministère de l'Intérieur, on assure travailler au sujet, et on rappelle que la préfecture a déjà doublé ses capacités en un an. " Il faudrait avoir plus de rendez-vous, et que ceux-ci soient plus mutualisés au niveau régional ", dit-on, tout en pointant la spécificité parisienne du problème. " Partout en France, les guichets uniques fonctionnent plutôt bien, mais il y a un dysfonctionnement fort à Paris ", lié au fait qu'en 2016 les demandeurs d'asile - Afghans, Soudanais, jeunes et isolés comme ceux que l'on retrouve souvent dans les campements parisiens - " n'ont pas de réseaux et vont spontanément vers la capitale ". " Il faut qu'on rediscute de nouveau des moyens budgétaires ", estime de son côté Didier Leschi, le directeur général de l'Ofii. " Avec une difficulté: il faut trouver un système pour organiser la répartition. "

Le 18/05/2016, Paris (AFP), Le Point